dimanche 2 octobre 2011

De Curva à Pellechuco: jour 4, 7 heures de marche

Voilà, c'est la dernière ligne droite jusqu'à Pellechuco.
Alors que je dors du sommeil du juste, je me réveille dans un cri et un sursaut à 1h30 du matin. Pierre qui n'arrivait pas à dormir, regarde l'heure sur sa montre et au moment de la ranger, me l'envois dans la figure... sans le faire exprès... Mais dans ce réveil en sursaut, je me retrouve bien réveillée et peine à me rendormir.
6h30, les yeux grands ouverts, on attend le soleil qui ne semble pas près d'arriver.
Pleine d'entrain, je me lève, file chercher de l'eau glaciale à la rivière pour préparer le thé et notre petit déjeuner.
La tente reste à l'ombre. Pierre veut attendre que le soleil arrive. Mes os se glacent dans cette attente. Je me blottis contre un mur à l'abris du vent et souffle l'idée de tout remballer et de s'arrêter plus loin, au soleil, pour faire sécher la tente et tout et tout. Têtu: regarde, le soleil descend vite, sûr on va avoir bientôt du soleil.
Puis comme on est quand même coincé entre deux vallées, 8h20, ok on remballe. Mais regarde, sur le champ, plus bas, du soleil. On va faire sécher la tente couverte de glace après la pluie et le froid de la nuit.
Et voilà comment à 8h40 on est enfin au soleil (mais on a bougé) après le réveil le plus glacial de ce trek.
Et d'un coup, alors qu'on sèche tente et duvets, un chien arrive et pas loin derrière, caché derrière un rocher, un chapeau... un enfant sous le chapeau. Tiens, un autre enfant... Ils arrivent comme des sioux à l'attaque du gibier mais leur fidèle serviteur trahis leur présence en rodant partout mais gardant une distance raisonnable avec nous qui lui faisons peur sans le vouloir. Voilà donc le chien le moins téméraire que j'ai jamais vu qui s'approche avec ses deux maîtres complices. Ils me diront leur prénom, mais je ne peux vous les répéter, ils ne me sont pas communs je ne les ai pas retenus. Ils ont 9 et 12 ans, ce sont des frères et ils sont aussi effrayés que leur chien qui n'a pas de nom.
Bref, impossible de caresser le chien et de leur faire prononcer plus d'un mot.
9h20, la tente est sèche, pliée, rangée, les sac prêts, on part. Et là, ils nous lancent des cailloux... ok, on a pas compris mais bon, on continue notre chemin.
Et avec le diner écourté la veille, la mauvaise nuit, le petit déjeuner bâclé à cause du froid et le froid... on a du mal tous les deux dans cette dernière montée à ce dernier col qui est à 4900 mètres selon mon guide, et 4800 selon celui de Pierre.
On croise un cortège de touristes anglophones avec un guide et loin derrières eux, muletiers et mules qui sont chargées de toutes leurs affaires... c'est pas vraiment le même voyage que nous, de plus, ils font le trek dans le sens inverse du notre.
Arrivés au pied de la montée la plus rude de toute ma courte histoire, on voit descendre presque en courant, une cholitas puis un jeune homme qui échangera quelques phrases avec nous.
Une fois la route libre, psychologiquement prêts à affronter cette montée dont on ne voit pas la fin, on attaque. La première partie semble bien passer même si elle est rude. 20 minutes nous suffisent à franchir la première zone de zigzagues. Puis en 10 minutes, on monte enfin la ligne droite qui n'est pas du tout horizontale comme on pouvait le croire en bas, non, elle monte et de façon plutôt raide quand même. Puis on attaque la dernière zone de "mil curvas". Et ça monte, ça monte, ça monte. On ne voit pas le col, caché entre deux grosses pointes. Cette montée n'en fini plus. Je m'arrache les tripes, au propre comme au figuré, je ne vais pas flancher avant de passer ce maudit col qui se fait désirer. Il nous aura fallut 1h30 pour arriver au col. Et là, col franchis, je vois la route raide qui redescend et je m'écrase sur le coté pour essayer de reprendre des forces.
Je n'imagine même pas que je pourrais redescendre.
Après quelques minutes, on se déplace pour être à l'abris du vent et Pierre découpe une pomme pour que je reprenne un peu de sucre et de forces, puis me prépare un super sandwich à la sardine... quand on a faim, tout est bon! Après 35 minutes de récupération, on peut enfin attaquer la descente, toujours avec une seule envie, trouver un vrai lit, une douche chaude et un bon diner.
Les paysages sont magnifiques mais souvent jonchés de détritus. Nous n'avons pris aucune photo du col parce que, d'une, il était moche, deux, il nous en a fait voir des vertes et des pas mûres et trois, il était super sale avec des bouteilles en plastiques et des emballages en tout genre de tout et n'importe quoi... bref, c'était pas photogénique!
Sur le chemin de la descente, je croise des cactus poilus (pour avoir moins froid par les glaciales nuit d'hiver je suppose) et en fleurs. De jolies fleurs jaunes. Un peu plus bas, on s'arrête bien 15 minutes pour observer un rapace qui plane au dessus de nous et pique régulièrement pour tenter d'attraper un "rapin" (l'animal impossible à prendre en photo). Il est magnifique. Nos photos ne rendent rien... mais bon, on aura tenté.
On poursuit notre route qui ne cesse de descendre. Nos genoux commencent à nous rappeler à l'ordre, mais il faut continuer. Moi, c'est mon ventre aussi qui me rappelle à l'ordre. Trop d'effort, j'ai perturbé tout mon ventre. Mais je tiens le coup, le simple espoir d'une douche chaude et d'un accès à la modernité avec le téléphone, me fait tenir le coup.
Finalement, vers 16h30 on arrive à Pellechuco. Une étrange ambiance dans la ville. Les gens sont assis autour de la place que je n'ose franchir. Des jeunes gens bien éméchés nous appellent "Gringos" et tentent de nous parler en anglais. Ca me renfrogne. L'hôtel nous dit qu'il n'y a plus de chambre et l'état des salles d'eaux que j'aperçois me donne envie de fuir. J'interroge un policier sur la place qui me dit que le chemin pour Agua Blanca est par là et dans cette direction aussi, des bus qui partent peut être ce soir pour La Paz.
Ok, l'albergue de Lagunillas n'avait plus ni eau chaude ni électricité. Celle de Agua Blanca étant en partenariat avec la première, on peut craindre le même entretien, le même état. Si un bus rentre à La Paz, on le prend.
Un bus rentre à La Paz. Départ 18h30, rendez vous 18h pour mettre les bagages.
Il fera terminus à El Alto vers 4h du matin. Ca, ça craint. L'assistant du chauffeur m'assure qu'on trouvera des taxis et moi j'ai envie de fuir ce village, cette montagne qui nous a caché ses sommets et ses condors sous le brouillard.
Alors on fuit, dans un bus qui semble luxueux et confortable... mais pourquoi donner de la confiture aux cochons?
Nous sommes les seuls étrangers dans ce bus et on nous observe. Nous, on veut juste dormir. Mais juste à coté de nous, un groupe de 4 à 6 hommes ont décidé que c'était samedi soir et qu'il fallait faire la fête. La fête, c'est se saouler à coup de Paceña, une bière locale.
Et alors que je tente de regarder le paysage dans la nuit noire (rappel, à 18h-18h30 il fait nuit), à coté, ils mettent cette musique insupportable qu'on entend partout et ils boivent des bières en urinant par la fenêtre du bus... Les autres passagers se taisent.
Finalement, Paris ou la Bolivie, même combat: il y a ceux qui abusent et ceux qui se taisent pour ne pas avoir de problèmes.
L'ivresse fini par les endormir et le bus trouve un peu de paix. Mais il fait un froid de gueux et le sommeil reste léger et inconfortable.
Par la fenêtre, je vois une fente de lune qui éclaire de magnifiques sommets enneigés, puis des lacs où les étoiles aussi semblent se refléter. Ne serait-ce le froid et l'ivresse de nos voisins, le voyage pourrait être agréable.
Le bus étant parti avec plus d'une demi heure de retard, nous arrivons à El Alto vers 5h du matin. Il fait encore nuit et froid. Notre mission, trouver un taxi, un vrai, qui nous dépose à l'hôtel.
Marcher nous réchauffe les pieds glacés. On cherche, c'est pas simple. On fini par trouver un vrai taxi qui nous demande 50 Bolivianos pour la course. A l'arrivée, il demandera 70 et comme on est crevé, qu'on veut une douche chaude, on se dit, bon, ok, ça ira.
6h, on sonne à l'hôtel. Ils nous ouvrent. on récupère notre sac, notre première chambre (la 105) et on file s'installer, se doucher.
De retour dans la chambre (salles de bain partagées, non privées) dehors la fête bat son plein comme hier soir à Pellechuco. Ils fêtent sûrement le mois d'octobre comme à Pellechuco.
Pierre se couche. Moi, je vous écris en attendant une heure descente pour sortir trouver un café internet pour prendre mon petit déjeuner et poster quelques messages sur le blog.

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